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Historique des moulins à vent.



      On ne commence à trouver trace des moulins en Lauragais que dans le courant du XIII° siècle. Mais depuis la nuit des temps, on savait produire la farine nécessaire à l'alimentation humaine.
Meule va et vient       Aux temps néolithiques, on écrasait le grain sur des pierres plates comme il s'en découvre encore en Lauragais. C'était alors une production individuelle ou familiale. Plus tard, les légionnaires romains emportaient dans leur paquetage une meule va et vient qui leur permettait de produire la farine pour leur usage personnel. Lors d'une campagne de fouilles, menées à Baziège en 1974, par un club archéologique, fut mis à jour, dans un puits funéraire, parmi d'autres objets, une meule va et vient en gré très fin. Les autres trouvailles de cette sépulture ont permis de la dater : premier siècle avant J.C. entre -50 et 1.
Meule romaine       Les romains (à Pompéi notamment) savaient produire de la farine, de façon moins artisanale, à l'aide d'une meule tournant sur une pierre fixe ; la partie mobile étant actionnée par des esclaves ou des animaux. L'entrée du grain se faisait déjà par le haut et le centre de la meule.
      Par la suite, la force motrice de l'eau aurait été utilisée pour actionner les meules, en bordure de cours d'eau.
      L'énergie du vent a été utilisée en Orient, dès le VII° siècle pour actionner des meules. Claude Rivals décrit, dans son ouvrage " Moulins et meuniers des pays d'Oc ", ces édifices fixes qui canalisaient le vent pour actionner les meules et qui n'avaient techniquement rien de commun avec nos moulins à vent. Selon lui, le moulin à vent est d'origine et de conception européennes (anglaise peut-être), car il fallait créer une machine d'utilisation souple, capable de s'adapter aux vents changeants de nos régions. D'autre part, nos moulins à vent ne peuvent avoir une origine orientale puisque lors de la troisième croisade (1189), les croisés, qui eurent des difficultés de ravitaillement, durent construire un moulin à vent sous les murs d'Acre qu'il assiégeaient. Les musulmans furent " fortement épouvantés " par cet édifice qu'ils croyaient être une fantastique machine de guerre, signe qui montre bien que les moulins à vents étaient inconnus dans ces contrées.
      En Lauragais, le premier moulin à vent est mentionné dans la région de Fanjeaux, sur la motte de Prouille, en 1223. Ensuite, il est fait mention d'autorisation de construire des moulins à dans la région de Pexiora en 1245, à Saint Papoul en 1255, à Montgiscard en 1309.
      Claude Rivals émet l'hypothèse que l'implantation de Bastides comme Villefranche de Lauragais, fondée vers1250/60 par Alphonse de Poitiers, gendre du dernier Comte de Toulouse Raimond VII, a facilité l'implantation et l'adaptation en Lauragais des moulins à vent, technique déjà utilisée en France du nord.
      Dans la vallée de l'Hers, partie lauragaise, une autre raison plus tardive a favorisé le développement des moulins à vent : le re-calibrage de l'Hers Mort. En effet, jusqu'au début du XVIII°siècle, le lit de l'Hers, sinueux au possible, était régulièrement entravé par les épanchoirs des moulins à grains ; des meuniers, aux périodes de pluie, stockant même l'eau dans des prairies. A la moindre pluie, les chaussées faisant obstacle à l'écoulement des eaux, toute la vallée de L'Hers depuis Villefranche jusqu'à la Garonne était sous les eaux, ce qui compromettait les cultures et, par là, l'approvisionnement de Toulouse. Des Edits des Etats du Languedoc et du parlement demandant la libération du cours de la rivière restèrent sans effet ; les propriétaires des moulins étant des notables, parfois même des membres du parlement.
mur du Moulin de Baziège
    Mur d'un des bâtiments de l'ancien
"Moulin de l'Hers de Baziège".
    On remarque des morceaux de
meules dans le mur.
      Le 5 mai 1739, un ordre royal est donné pour détruire les moulins de l'Hers et il est prévu de dédommager les propriétaires dès que la démolition sera faite et de les condamner à leurs dépens s'ils y sursoient. Les propriétaires, cette fois-ci obéirent et au vu des indemnités qu'ils obtinrent, on peut penser que le travail fourni par ces moulins était considérable.
      Il est évident que la disparition de ces moulins hydrauliques va favoriser l'essaimage des moulins à vent sur tous les versants de la vallée de l'Hers.       Parfois le moulin à eau pouvait suppléer au manque de vent, en période de pluie; à Mascarville, faisant pendant aux deux " bucs " sur la colline, un petit moulin de ruisseau " un escouto se plau " ( un écoute s'il pleut) attendait le gonflement des eaux de printemps pour se mette à l'ouvrage.
      Au XIX° siècle, les moulins vont profiter de la technologie due aux progrès de la métallurgie : la fonte et l'acier vont faire leur apparition dans les différents rouages et parties à usure rapide comme les " courbants " et les rouets.
      Au XX° siècle, l'arrivée de la fée électricité, après 1920, va immobiliser à jamais les ailes de nos géants : les moteurs électriques étant d'une utilisation beaucoup plus régulière, le travail du meunier va s'en trouver largement facilité. Le moulin de Montbrun, par exemple, va être électrifié. Quelques fidèles, comme le meunier de Cambiac, vont rester fidèles au vent jusqu'au début des années soixante.
      Une autre cause de la disparition des moulins à vent, c'est le changement dans la façon de produire son pain. Jusque dans les années 1925, le pain était pétri et cuit dans chaque ferme qui faisait moudre son grain par son meunier. Après cette date, les habitudes changent : on vient au village acheter son pain, ou le boulanger l'apporte à domicile lors de sa tournée. Les artisans boulangers vont se fournir chez des industriels (minoterie de Naurouze) et vont délaisser les meuniers qui n'étaient pas capables de produire la farine en quantité suffisante, en qualité constante et à bon prix.
      La commercialisation du blé, à partir de grandes structures comme les coopératives céréalières, va diversifier les circuits du blé et l'ONIB (Office National Interprofessionnel du Blé) assurera des revenus réguliers aux producteurs (1936).
      Il ne restera plus aux rares moulins encore en activité qu'à moudre les céréales pour nourrir les animaux et le maïs pour en obtenir la farine qui servira à confectionner un des aliments de base du lauragais, le " millas ".
      La fin des moulins à vent va coïncider avec la fin d'un mode de vie autarcique de nos campagnes. On va produire pour vendre et non pour " échanger autour de soi " les produits que l'on récolte ou que l'on fabrique. La mécanisation, assez lente dans le Lauragais, va inciter le paysan à s'endetter pour acheter les outils nécessaires à une production plus abondante. Seuls les métayers, assujettis souvent à des propriétaires avides de profits, ne pourront suivre l'évolution et finiront par disparaître, dans les années 50, tout comme leurs employeurs à contre-courant de l'Histoire.



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